Association des décoratrices et décorateurs de cinéma

William Abello en interview

l’interview du moment | 09/11/2014

Fièvres, le film de Hicham Ayouch, est discrètement sorti au cinéma fin octobre, après un double prix d’interprétation au Festival de Marrakech en 2013.
Les décors sont de William Abello, donc interview.

Quel spectateur êtes-vous au cinéma ? Omnubilé par le décor ?
Au cinéma en salle je me laisse porter, je suis très bon public, mais devant mon écran /dvd, là je suis un vrai scrutateur dénigrant /critique aux manettes !

Un film pour lequel vous auriez payé pour assister au tournage…
Plusieurs : 20 000 lieues sous les mers, 2001 l’odyssée de l’espace et 300. Je me sens bien dans les films épiques, fantastiques ou historiques avec beaucoup d’effets. Mais le meilleur des effets, c’est la mise en scène, alors Les 39 marches aussi pour le compte.

Dans votre cas, devenir comment devient-on décorateur de cinéma ?
Lycéen, en animant une émission TV pour les ados en 76…sur les plateaux d’Epinay. Le réalisateur nous fit visiter la construction des décors de Cet objet obscur du désir, révélation… ! Et ce fut mon premier stage…

Décor de pub et de cinéma, que préférez-vous dans l’un et l’autre ?
Dans la pub (d’avant 2007) : on se casse la tête et on casse la tirelire, place aux visuels les plus stylisés, le plus souvent « à la manière de ». C’est un formidable laboratoire, bien des softs appliqués à l’image numérique se sont développés en pub.
Au cinéma : l’imagination est en route dès la lecture (fondatrice) du scénario. Pour moi c’est le moteur qui déclenche les envies de collaboration alors après plus de 800 pubs, ce siècle j’ai tourné ma bobine plein focus sur le film de long-métrage.

En quoi avez-vous changé depuis vos débuts ?
Je parlais beaucoup de la technique, du "comment va t’on si prendre ?" Depuis 8/10ans, c’est le « mais pourquoi cette ambiance ? » qui est dans mon esprit. Il ne faut pas conclure que je veux dominer le sujet à tout prix mais m’en imprégner. D’ailleurs certains réalisateurs qui vous proposent des scénarios / synopsis un peu absconds auxquels vous ne comprenez pas tout, sont formidables pour vous entrainer dans leurs visions.

Je privilégie des films ou comme au théâtre une licence, une distance peut opérer. Ce genre d’approche fonctionne bien dans le comique aussi. Je m’en suis aperçu avec Fabien Onteniente à qui j’avouai ne rien comprendre au foot et aux footeux et qui m’engagea pour avoir un autre point de vue (il fut servi).

Le décor et les tournages vous ont-ils fait voyager ?
Pendant 17 ans, j’ai travaillé plus de 180 jours par an à l’étranger (82/99), surtout en publicité… ! Pas facile de faire court, je peux dire que je connais les quincailleries et brocanteurs d’une vingtaine de pays bien mieux que leurs monuments.

Alors, non je n’ai pas vraiment voyagé grâce à ce formidable métier. J’ai carrément vécu dans ces pays, dans leurs industries cinématographiques très variées. Depuis Pinewood et ses Algécos aux plateaux à l’air libre de Munbay’s Hill, ce sont des aventures initiatiques professionnelles que j’ai connu.

Et si vous n’aviez pas été décorateur ?
Journaliste, sociologue, urbaniste (mes études au départ), créateur de mode aussi…danseur.

L’exposition, le spectacle ou le film à ne pas louper…
Alors, en musique par exemple, d’actualité en ce moment : Tigran Hamassyam pianiste jazz qui vous tire les larmes des yeux, en tournée en France, et le lyrique baladin Nilda Fernandez (trop oublié) qui sillonne les bars-concert de nos Banlieues.

Quelques mots sur Fièvres ? Quelle place pour le décor dans le cas d’un film à tout petit budget ?
Fièvres, c’est d’abord le choc du scénario et la détermination, de Hicham Ayouch son réalisateur, qui transporte. Il est journaliste à la base et plein de fantaisie. Devant notre budget, nous avons établi un Dogme avec la production (La Vingt-Cinquième Heure) et le chef opérateur Boubkar Benzabat.

A partir du décor principal de Noisy-le-sec, tous les repérages s’inscrivent dans un cercle de 500 mètres de rayon et cela marche bien en adaptant. Le découpage, ce fut une véritable auto-psy. Et au départ une ligne d’intention graphique façon photo-roman (voir la fiche).
Ensuite, offensif sur le terrain, en restant attentionné au confort de l’équipe (des salaires aussi), mais toujours soucieux de résultats visuels de grande classe, cela donne le film Classilla !
Un tournage de guérilla, avec un budget low cost et un rendu ultra… !

Une question (et sa réponse) à vous-même ?
« Après 38 ans de piste quoi encore ? »
Et bien justement améliorer la piste, que nous progressions sur les moyens d’optimiser nos interventions artistiques, nos expertises logistiques en établissant un rapport de grande confiance avec les auteurs, les réalisateurs et les producteurs. Créons des outils !
L’agrandir aussi, pour ma part je suis un scénographe avant tout et je m’attache autant au casting, maquillage, costume, lumière, qu’aux objets et mobilier, constructions et lieux, qui sont des traductions visuelles des intentions souvent mieux indiquées. Discernons la direction artistique de l’envie artistique.


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