Association des décoratrices et décorateurs de cinéma

Un entretien avec At Hoang (1950-2014)

l’interview du moment | 11/05/2023

En 2014, à l’occasion de la disparition d’At Hoang, nous avions publié cet entretien réalisé plus d’une décennie plus tôt.

D’abord peintre de base (comme il le dit lui-même) puis peintre pour effets spéciaux, At Hoang s’est imposé comme chef décorateur avec trois films successifs à - très - grands décors : L’amant, Germinal, Sept ans au Tibet. Dans les années 2000, la maladie l’avait obligé à ralentir son activité.

Qu’est ce qui vous mené au décor de cinéma ?
J’ai démarré dans les années 1970 grâce à ma sœur aînée, Thi-loan, devenue depuis une grande chef maquilleuse du cinéma français. Elle m’a emmené sur le plateau d’une série télé, j’étais sans travail et la production m’a embauché comme homme à tout faire. C’était payé de main à la main, j’y suis resté en passant ensuite au décor, stagiaire puis assistant. La télévision de l’époque fabriquait beaucoup de feuilletons, Vidocq, Arsène Lupin, des variétés…J’aurai aimé entrer au département décor de l’ORTF, mais après son éclatement et la création de la SFP, le recrutement se faisait sur concours et je n’avais aucune formation, aucun diplôme. Quand au cinéma, j’allais frapper aux portes des studios, à Epinay ou à Boulogne, mais sans résultat. La TV et le cinéma étaient alors complètement cloisonnés.

Avant d’être chef décorateur, vous avez été peintre puis chef-peintre au sein des équipes décoration.
Je dessinais un peu, sans plus. J’ai beaucoup travaillé seul, avec l’aide d’amis artistes peintres qui m’ont appris la peinture, comment regarder et analyser un tableau, comprendre la couleur. Je cherchais avant tout gagner ma vie. Je ne pouvais entrer dans le décor que par la petite porte, par un travail d’exécution. Sans aucune formation, je ne pouvais pratiquer qu’un métier manuel et j’ai été peintre de base pendant quelques années, en faisant de la barbouille, des enduits…
Entre temps, j’avais appris à faire des reproductions et peignais pour des clients privés : des toiles, des fresques dans des appartements. Et petit à petit, j’ai fait des peintures hyperréalistes et des matte-paintings pour le cinéma.
Les mattes étaient surtout utilisés dans la publicité. Aujourd’hui, ils sont scannés et intégrés en numérique, mais à l’époque, on les faisait « en direct », c’est-à-dire à la prise de vue. Le dernier que j’ai peint ainsi était une tour Eiffel pour Camille Claudel de Bruno Nuytten, dans une scène où la caméra panote vers le haut et découvre les toits de Paris. J’ai toujours aimé les mattes en direct, sur le plateau, J’ai essayé sur Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, ça n’a pas été possible, entre autres à cause du vent. Ils ont été faits en post-production, comme le plan en plongée sur le port dans L’amant, ou le fort qui explose dans 7 ans au Tibet.

Quelles qualités exige-t-on d’un matte-painter ?
Savoir dessiner de façon hyperréaliste, bien connaître la lumière pour le raccord avec la scène filmée. Il y avait des sociétés spécialisées en post-production avec des matte-painter professionnels, par exemple Jean-Marie Vivès, avec sa société Excalibur. Moi, j’étais embauché au coup par coup, pour des mattes traditionnels. Progressivement, on a cessé d’en faire, quand on a pu incruster des photos, les retravailler à la palette graphique. A présent, on peint directement à l’ordinateur. Mais même si on utilise plus de pinceaux, il faut avoir l’œil pour les couleurs, la lumière.

Dans votre filmographie de chef décorateur, vous n’indiquez que les films à partir de L’amant, tourné en 1991.
A part une ou deux exceptions, je préfère ne pas les citer, il fallait bien manger ! Jusqu’à L’amant, les « gros » films n’étaient pas pour moi, je n’avais fait ni architecture, ni les arts-appliqués, ni les Beaux-arts…Par contre, j’étais demandé en tant que peintre, en long-métrage comme en publicité. Je préférais être chef peintre que chef déco sur des films sans décor, ou le travail consistait juste à bricoler, faire un peu de peinture, changer un papier peint…C’est ce type de film qu’on me proposait, et je refusais d’avoir trop de responsabilités sur des projets inintéressants ou avec trop peu de moyens, des budgets autour de 200 000 francs.
J’ai aussi été premier assistant sur des films importants comme Fort Saganne ou Uranus, et chef décorateur sur le seul film non-documentaire tourné en Omnimax : Vite et loin, de Pierre Etaix. Et aussi le seul -à ma connaisssance- tourné en studio. J’avais d’abord été appelé pour les mattes, l’angle de vue était 140° horizontal, 110° vertical et le problème était : comment éclairer ? Pour cacher le grill et les projecteurs, il fallait dessiner le développement d’un plafond et le remettre à plat, pour qu’il soit sphérique à la projection. C’était à la fois complexe et empirique.
Je précise que j’ai mis beaucoup de temps à avoir ma carte professionnelle de chef décorateur. Je me faisais appeler déco-ensemblier car il n’existe pas de carte pour ce poste. A partir du moment ou d’autres techniciens d’un même film avaient leur cartes, le CNC m’accordait une dérogation, grâce aux demandes de metteurs en scène ou de producteurs importants. J’ai finalement obtenu ma carte après le succès de L’Amant.

L’action de L’Amant est située au Vietnam. Avez-vous été choisi aussi pour vos origines asiatiques ?
Certainement, ça a compté. Je parle la langue et j’étais heureux de retourner travailler dans mon pays, j’avais le sentiment de le connaître, même si je l’avais quitté à huit ans. Au départ, j’étais l’assistant de Jean-Jacques Caziot et nous avons fait ensemble les repérages au Vietnam. Le film s’est ensuite arrêté. Quand il a repris, Caziot était parti sur un autre projet et Annaud m’a confié les décors.

Ou ont été tournés les intérieurs, comme cette chambre bleue où se retrouvent les amants ?
Les intérieurs et une partie de rue ont été construits en studio à Paris. Il y a plusieurs décors naturels, comme le restaurant chic tourné dans un pavillon de la Cité Universitaire. Et l’intérieur du paquebot, c’est la salle des pas perdus de l’Opéra de Marseille que l’on aménagée, en rajoutant des panneaux avec des hublots raccord avec le vrai bateau.
Il y a eu un gros travail de reconstitution sur les extérieurs au Vietnam. Le bac au début du film a été entièrement construit sur place, équipé de deux moteurs pour naviguer chargé avec cent personnes, et en tenant compte du courant. Je voulais le relier à deux remorqueurs, pour éviter qu’il dérive. Mais quand Annaud a décidé de filmer la scène avec un objectif 16mm, c’est devenu impossible de les utiliser car ils auraient été dans le champ. Ca fait partie des moments où on souhaite que tout se passe bien. Heureusement, les ingénieurs vietnamiens connaissent leur boulot !
Quant à cette chambre qui baigne dans un ton bleu, on m’en a beaucoup parlé et c’est avant tout un effet de matière que je recherchais. Trouver une harmonie entre la matière des murs, la peinture, la lumière et le ton intimiste de la scène. On a travaillé comme pour une fresque, en préparant la surface au plâtre, avec de la chaux. La chaux absorbe la lumière au lieu de la refléter. Contrairement à une couche de peinture, même mate, qui dépose une pellicule en surface, sans arriver à cet effet de matière où les reflets sont absents.

Comment préparez-vous un film ?
Je prends le temps de dessiner tous les décors, pour montrer ce que suggère le scénario. Ces documents, des ambiances, des perspectives, me permettent de travailler avec les metteurs en scène. Parfois, je fais des maquettes hyperréalistes, en volume. C’est ce qui a convaincu Berri et certains financiers pour Germinal.
Quand on préparait avec Jean-Jacques Annaud, il me parlait et à la fin de sa phrase, il y avait son dessin. Il n’en revenait pas. J’ai développé cette technique, un peu à la manière d’un story-boarder. Après, chez moi, je passe aux volumes, je précise l’atmosphère : un objet, une tâche de lumière. C’est ma méthode.

Après L’amant, vous enchaînez avec un autre film à gros budget, Germinal, réalisé par Claude Berri
C’était un très gros projet, lourd, cher, qui a représenté pour moi un an et demi de travail, préparation et tournage compris. Claude Berri, qui avait produit L’amant, m’a appelé un samedi soir pour me donner le scénario de Germinal. Dès le lendemain, on est parti en repérages et je lui ai fait des esquisses qui l’ont convaincu.
On a repéré toutes les mines de France mais les plus anciennes datent de 1930. J’ai longuement visité les écomusées, les bibliothèques, consulté les documents contemporains et surtout antérieurs à Zola. Car le Voreux, c’est une mine de 1840, en bois, pas du tout contemporaine de Zola ou de l’architecture métallique du XIXème. Il fallait donc entièrement recréer le Voreux en décor. J’ai dit à Berri : la mine doit être un personnage, au même titre que les comédiens. Si le décor ne joue pas, le film ne passera pas. On ne pouvait pas se contenter de simuler l’atmosphère d’une mine, car le scénario comportait des scènes spectaculaires : explosions, inondation des galeries…Il fallait y croire, et pas seulement sur le plan psychologique. Donc, ce décor devait couter cher.
Près de 80% des décors du film ont été entièrement construits, plus d’une centaine de personnes sont montées de Paris. Devant la masse de travail, la production a ensuite engagé Christian Marti. Il a travaillé dans la ligne définie pendant la préparation, mais comme un décorateur à part entière, pas comme un exécutant.

Les galeries souterraines sont importantes sur le plan dramatique. Comment ont-elles été réalisées ?
A Valenciennes, nous avons aménagé un hangar de 6000m2, il a fallu en sonder le sol et le stabiliser. Nous avons créé une piscine de 2000m2, avec tout un système de recyclage et de chauffage de l’eau, qui sinon geler. Les plafonds des galeries sont en moulage de résine et les parois en caoutchouc. La résine ou le plâtre auraient été trop durs, les comédiens auraient pu se blesser. Donc, on a agrafé plusieurs peaux en caoutchouc, elles-mêmes auparavant moulées sur de la pierre et qui en imitaient la rugosité, le matiérage.
Pour la taille de la roche, il fallait que le geste soit crédible. Quand Depardieu attaquait à la pioche, cela ne pouvait être que des blocs de vrai charbon. Avec l’aide de la société des Charbonnages de France, on en a fait venir de la seule mine à ciel ouvert, située dans le centre de la France. Germinal présentait des aspects techniques très spécifiques : ingénierie béton, machinerie ….Tous les effets spéciaux ont été réalisés en direct, l’inondation des galeries, l’explosion du monte-charge qui était une maquette de près de 4 m de diamètre. Un décor comme Sept ans au Tibet était beaucoup plus grand mais il ne comportait pas tous ces défis techniques.

Avez-vous vu les autres films tirés du roman de Zola ?
Il existe une version muette et j’ai vu le film d’Yves Allégret qui date de 1963. Les décors sont succincts et il y a beaucoup de maquettes, on est souvent en gros plan. On y croit moins. Le brasier réalisé par Eric Barbier est également situé dans une mine, mais il y a moins de décors et sûrement moins d’argent que dans Germinal. Il a été question de conserver le décor de notre film après le tournage, pour le faire visiter. Mais comme rien n’avait été conçu dans ce but, seules quelques parties ont pu être récupérées et remontées dans des écomusées de la région.

Votre décor suivant est pour une production international, Sept ans au Tibet
J’étais en pleine préparation de Lucie Aubrac pour Claude Berri, quand Jean-Jacques Annaud m’a proposé son film. Mais il fallait commencer dans quinze jours. Comment en parler à Claude ? Je m’attendais à une enguelade mais au contraire, il m’a encouragé à accepter.
J’ai laissé Lucie Aubrac à mon assistant, Olivier Radot, et nous sommes partis 3 mois en repérages avec Annaud : la Chine, le Tibet, l’Inde. Le film se préparait à Londres, les producteurs étaient en majorité américains, et moi, j’avais fait un devis « à la française ». Heureusement, Annaud m’a mis en garde : « At, tu oublies tout ce que tu as fait jusqu’à présent. Ce film, c’est cinq ou six marches au-dessus. Tu as affaire à des américains et c’est une putain d’industrie ».
Le film devait se faire au Ladakh, mais les autorités indiennes nous ont refusé l’autorisation de tournage. Idem pour Martin Scorsese qui préparait Kundun et qui s’est rabattu sur le Maroc. Annaud ne voulant pas se trouver au même endroit que Scorsese, je suis parti à la recherche d’un autre Tibet, cette fois en Amérique du sud. On a fini par trouver un paysage qui convenait en Argentine, dans la cordillère des Andes, à Uspalata. L’accès était facile et la ville de Mendoza n’était qu’à 100km, avec tous les équipements nécessaires.
Au Ladakh, on aurait tourné dans des décors déjà existants, à compléter et transformer. Donc, il a fallu rapidement revoir la préparation pour l’Argentine où il y avait tout à créer : la ville de Lassah, les entrées de temple, les rues, etc…En dehors de quelques mattes et de quelques intérieurs construits dans un hangar à Mendoza, tout a été fait en extérieur, en altitude. L’équipe décoration a atteint les 500 personnes, dont 400 argentins. On a construit pratiquement à l’échelle, en tenant compte des contraintes écologiques et archéologiques, car le site comportait des traces de civilisation amérindienne.

Etes-vous intervenu en post-production ?
Dès les repérages, avec Maxime Rebière qui était chargé du storyboard, on avait fait des dessins en indiquant le décor, la lumière, et les incrustations pour recréer les fonds de montagnes du Tibet. Le tout à l’attention de la post-production.
Après le tournage, j’ai rejoint Jean-Jacques Annaud à Londres pour visionner tous les rushes. En photographiant directement l’écran de visionnage, j’ai obtenu des tirages que j’ai retravaillé. La post-production, les matte, la 3D,…a été réalisée par Magic Caméra, ceux qui sont ensuite devenus la société The Mill et créé l’immense arène de Gladiator. J’ai travaillé avec eux et quand j’ai du partir sur un autre film, ils avaient une pile de documents, les photos retouchées avec les modifs, les commentaires de Annaud, en somme un cahier des charges pour chaque séquence. J’étais donc comme un directeur artistique, un poste qui n’existe quasiment pas en France. Ici, on ne connaît que depuis peu le métier de production designer, ou les possibilités du digital.

Avez-vous eu d’autres projets avec Jean-Jacques Annaud ?
Oui, j’ai fait l’étude des Ailes du courage, un moyen-métrage en Omnimax. Pour Les deux frères, j’ai été au Cambodge, mais je suis tombé malade et n’ai pu faire que l’étude artistique.

Vous avez mentionné le storyboard, en quoi vous sert-il ?
A connaître le découpage, la valeur des plans. Qu’est-ce qu’on voit d’un décor ? Est-ce qu’on a besoin de plafonner ? Les américains ont toujours utilisé le storyboard, alors qu’en France, il a été longtemps réservé au film publicitaire. Et les réalisateurs le snobaient, trouvant que ça faisait trop pub, ou par peur d’en être prisonnier, comme Alain Corneau sur Fort Saganne. Depuis une quinzaine d’années, les choses ont évolué.

Le décor du second Astérix, Astérix et Obélix : mission Cléopâtre est délibérément différent de celui du premier épisode.
On a volontairement oublié le village gaulois du premier film. Le décor construit à Arpajon par Jean Rabasse avait été démonté et d’ailleurs, dans Mission Cléopâtre, il n’y a que deux séquences dans le village. J’avais quand même suggéré de le faire en maquette pour une vue en plongée, mais finalement, on n’a retenu que la hutte de Panoramix. L’intérieur a été construit en studio, et l’extérieur est une maquette réduite.

Avez-vous tenu compte des images de la bande dessinée ?
Chabat avait adapté le scénario à la personnalité de Djamel, ce ne pouvait pas être la même ambiance que la BD. Il était inutile de reproduire chaque dessin de Uderzo.
Nous avons tourné au Maroc, à Ouarzazate. Pour le décor du palais de Numérobis, je me suis dit : c’est un péplum, le décor doit exister. Le spectateur doit suivre l’évolution du palais, voir le chantier avec des personnages dedans. Le format de l’image était 2,35. Le décor devait lui aussi être très allongé, il fallait remplir, donner l’impression de très grand mais en évitant la surcharge. J’ai revu ces vieux films hollywoodiens, Les dix commandements, Cléopâtre… Les acteurs comédiens sont complètement noyés dans les détails, il y a des sculptures partout, jusqu’au fin fond de l’image !
Quand Trauner a fait un décor de péplum , il n’a pas cherché à faire grandiose, ni à tout reconstituer. Il a juste construit des parties de décors, de manière simple, et les a complétés avec des incrustations de maquettes.
Pour Astérix, il fallait donner l’impression de grandeur, de réalisme et éviter la surcharge pour mettre en avant le jeu des comédiens. J’ai utilisé des formes basiques, des solutions simples et graphiques, comme pour les échafaudages du palais qui sont une forêt de rondins. Ils forment une structure, une masse mais sans boucher l’horizon. Et en plus, il n’y avait rien à peindre ou patiner !

Le film ne semble pas faire un usage abusif des effets spéciaux
Pour la séquence de la bataille, avec Alain Chabat et la production, nous avons tenu à faire des effets mécaniques, éviter autant que possible la post-production et faire évoluer les personnages dans le décor, sur des plans très larges.
Les colonnes qui s’écroulent, les boulets qui cassent l’aigle au dessus de l’entrée, tout est fait en direct et à l’échelle par des spécialistes, Les Versaillais. Cela donne un côté vivant, artisanal et proche de la bande dessinée. Le film comporte bien sur des maquettes et des mattes incrustés numériquement. Pour certains d’entre eux, j’avais d’autres idées que celles que l’on voit dans le film. Mais on agit bien sur en concertation, et au final, c’est le réalisateur qui tranche, c’est son film.

Après ces sommets -en termes de budget- et un film américain, comment redescend-on vers la production courante du cinéma français ?
Sans problème, même s’il n’y a pas autant d’argent. Il faut être ouvert à tout, ne pas avoir de style. On nous demande d’être des bons techniciens plutôt que des artistes. Nous devons reconstituer ou transposer des choses existantes, en appliquant nos connaissances. Il n’y a guère que pour les histoires extraordinaires où il y a création originale.
D’ailleurs, sur un film, la part de création ne représente que le quart du travail. Le reste est politique, comptabilité, gestion. C’est valable pour les petits comme sur les gros budgets où on s’entoure d’assistants qui ne font que du dessin, d’autres chargés de mettre à jour les dépenses, les salaires de l’équipe, les fournitures….

La moitié de l’action de La femme de ménage se déroule dans un appartement avec, en découverte et bien en évidence, la façade d’immeuble en face
Le décor a été placé sur praticable, à 1m de hauteur pour ne pas voir le sol du plateau quand la caméra s’approche de la fenêtre. La découverte est éloignée de 5m, ce qui correspond à certaines rues étroites proches de la rue de Seine. On n’a pas triché sur l’échelle, mais sur les proportions des fenêtres, soigné leur position pour avoir des perspectives intéressantes. Surtout, on a voulu faire vivre la découverte. Les fenêtres s’ouvrent, on voit des bouts d’appartements, il y a des figurants et même des pigeons. La lumière de Christophe Gauthier, le chef opérateur, a révélé cette découverte au lieu de l’effacer, cela accentue le réalisme. On a trop tendance à brûler les découvertes, ou les cacher par des voilages, surtout s’il s’agit d’agrandissements photographiques.

Qu’est-ce qui a guidé vos choix pour l’appartement de Jean-Pierre Bacri ?
Le personnage est ingénieur du son qui travaille dans un studio d’enregistrement. Avec Claude Berri, on s’est posé la question de le faire habiter ou non dans un loft, ce qui aurait fait plus bohême ou branché. Mais dans ce quartier du VIème, ce sont des vieux appartements avec des petits volumes. Le décor ne fait que 60m2, il est crédible. Pas besoin de faire plus grand puisqu’on peut déplacer à volonté les feuilles décor. On a insisté sur ce qui se rapporte au métier du personnage : une belle chaîne hi-fi, une collection de photos de jazz soigneusement encadrées. Et aussi un peu de Ikéa, le style devait être contemporain, sans être haut de gamme.

Comment un décorateur trouve-t-il ses marques face à un metteur en scène ?
Un réalisateur doit se sentit en confiance avec son décorateur, ne pas s’inquiéter du décor pour se concentrer sur son film, le texte, les acteurs. Pour pouvoir définir l’ambiance générale du film, mon travail consiste d’abord à bien comprendre ce que cherche le réalisateur. Il doit être exigeant, être face à une demande m’est indispensable. A partir de là, je cherche un compromis entre son goût et le mien. Je dois justifier mes propositions, montrer que telle solution, tel choix est juste pour le décor et pour le film.

Entretien réalisé chez At Hoang par Alexandre Tsékénis, le 26 mai 2003


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