Paris, le 13/12/2014
Cher Monsieur le Porte Parole,
je suis très surpris par le ton de votre intervention dans le Figaro.fr du 5/12/2014. Vous annoncez que « les critères des clients ont nettement évolué depuis quelques années » ; vous conviendrez que les décorateurs de cinéma sont, en tant que les représentants des Producteurs qui les emploient, les
principaux utilisateurs de ces studios.
En effet, pour un jour de tournage, on compte en moyenne de 4 à 5 jours de préparation, construction, pré-light, démontage, entre autres.
En restant dans un cadre totalement marchand et sans affect, nous somme de fait, vos
principaux « clients », nous sommes donc complétement à même de définir les besoins du
cinéma d’aujourd’hui et sommes très surpris par votre concept d’ « ultra-modernité ».
Je ne vais pas ici rentrer dans une polémique stérile de comparaison entre les
Studios de Bry et ceux de Paris. Je n’ai d’ailleurs pas eu encore la chance, d’y faire un
long métrage, ni même un tournage de publicité. Je reviendrais seulement sur votre
comparaison avec les Studio de Pinewood, ou j‘ai passé de nombreuses semaines.
Le principal atout de ces studios et leur modernité, est la proportions entre les lieux de
préparation et les lieux de tournage qui sont au minimum 1/ 4 -3 / 4. Vous savez comme
moi, que le « grand cirque » autour d’un tournage occupe beaucoup plus de place que les
lieux de tournage eux-mêmes : les bureaux de préparation, les ateliers de fabrications
costumes, de fabrications d’accessoires, la tapisserie, les ateliers de menuiserie, peinture,
serrurerie, sculpture, la construction en extérieur, le montage durant le tournages, la
coiffure et le maquillages, les loges, la cantine, sans parler de la post-production sont les
véritables « mangeurs d ‘espaces ». Les connections de ces différents lieux sont un
véritable critère de rapidité et d’efficacité.
Si nous défendons si vivement les studios de Bry, c’est que nous y trouvons ces
possibilités. Tous les studios européens qui ont été rénové ces dernières années (Prague,
Bucarest, Budapest, entre autres), possèdent ces éléments.
Bry dispose en plus d’un avantage particulier, qui en fait sa particularité : il s’agit un
espace important de pré-montage. Cela permet de pré-fabriquer des décors importants
aux portes des plateaux, et ainsi d’occuper ces derniers, Graal du tournage, le moins de
temps possible. Cette disposition assurant évidemment aux productions une réduction de
coût : les plateaux représentant, comme vous le savez, un coût conséquent d’un film en
studio. L’évolution de l’économie du cinéma français me semble un critère d’ « ultramodernité » beaucoup plus important que la nouveauté ou l’ancienneté d’un lieu.
J’ai toujours soutenu le très ambitieux projet de Luc Besson sur la Cité du Cinéma. Sa logique, en équation avec la pensée anglo-saxonne contrairement à celle d’autre poids-lourds du cinéma français, est de considérer le studio comme lieu naturel du cinéma. Les décorateurs français et les équipes de construction et de tournage attendaient avec « gourmandise » la venue de ces productions étrangères, que devaient attirer ces nouveaux studios. Malheureusement à ce jour, nous n’en avons pas encore vu les effets. La Cité n’a certainement pas encore atteint la qualité du rêve de Luc
Besson….. mais nous avons bon espoir !
Si vous comparez les surfaces totales des studios de cinéma à Londres, Prague, Bucarest, ou Budapest, sans parler de l’Allemagne, vous comprendrez que Paris, grand pays de cinéma en Europe, reste absolument sous équipé. La disparition des studios de Bry qui reste à ce jour un outil véritablement performant, ne renforcera en rien ceux de la Cité. Il permettra certainement au groupe Euro Média une belle opération financière aux détriments des utilisateurs/clients qui lui a permis d’exister jusqu’à ce jour.
J’ai pendant des années considéré ce groupe au de-là d’être un prestataire de service, comme un véritable partenaire au service du cinéma français. Il semble que la logique financière ait pris le dessus sur la vision du cinéma de ses dirigeants, à leurs débuts à la Plaine Saint Denis. Quel dommage !
Veuillez recevoir, Monsieur le Porte Parole, mes salutations.
Dan Weil